
Gemmrich : “Pogba et Griezmann sont des pépites !”
Ex-International (5 sél. 2 buts), Albert Gemmrich a marqué l’histoire de la D1 avec Strasbourg en étant champion à la fin des années 70. L’ancien bordelais (1979-1982) se confie pour Foot-Express.com.
- 29 juin 2016
- Posté dans L'interview
Albert, comment sentez-vous les hommes de Didier Deschamps avant ce quart de finale face à l’Islande ?
La France n’a pas eu d’adversaires de prestige pour le moment entre la Roumanie, l’Albanie, la Suisse, l’Irlande et l’Islande à venir. Mais c’est le tirage au sort qui voulait ça et je pense qu’on a bien réussi le premier objectif à savoir sortir des poules. Beaucoup de médias ont mis la pression sur cette équipe. Heureusement qu’elle possède des joueurs intelligents tout comme son entraîneur car tout le monde ne supporte pas forcément une telle pression. Mais cette pression, elle fait partie du job d’un footballeur, c’est indéniable.
Vous pensez à des joueurs en particulier ?
Oui. Prenons l’exemple de Pogba et Griezmann. Il faut les laisser s’épanouir ! Paul a seulement 22 ans, et Antoine 25. Ce sont des pépites ! Quand ils font un bon match on dit d’eux que ce sont les meilleurs joueurs du monde, qu’ils vont ressembler à Zidane et à Platini et quand ils sont moins bons on entend des « Est-ce que nous n’étions pas un peu trop sûrs de nous ? Sont-ils vraiment des grands joueurs ? ». Tout est remis en cause à chaque fois après chaque prestation. Laissons travailler ces garçons ! Ils ont un groupe qui vit bien ensemble, avec un staff technique et médical de très haut niveau. On sent qu’ils veulent gagner cet Euro.
Que pensez-vous de cet adversaire islandais ?
C’est une équipe qu’il faudra prendre très au sérieux. Et je peux vous garantir que c’est ce que feront les Bleus et Deschamps le premier. Il ne néglige aucun détail. Il voit tout, est au courant de tout. C’est un excellent sélectionneur. Je ne connaissais que le joueur mais désormais je connais l’homme et c’est vraiment quelqu’un qui aime le maillot bleu. Il a cet esprit France. Ce maillot lui colle à la peau. Comme à tous les joueurs.
Parlons maintenant des trois autres quarts de finale de cet Euro 2016, à commencer par Pologne – Portugal. Qu’attendez-vous de ce match ?
Ce sont deux équipes qui se valent. C’est un match qui sera je pense très indécis. Néanmoins les joueurs vont se lâcher car il n’y a plus de calcul à faire. Allez pour un petit pronostic, je dirai le Portugal car j’aime bien cette équipe. A mon avis, ils ont trouvé leur rythme de croisière. Ils peuvent créer la surprise dans cet Euro.
Après avoir battu la Hongrie, les Diables Rouges d’Eden Hazard vont affronter le Pays de Galles de Gareth Bale. Selon vous est-ce un adversaire facile pour les belges ?
Non, il faut faire très attention à cette équipe galloise. Wilmots qui est un très bon sélectionneur a dû mettre en garde ses joueurs à propos de cette équipe. Ils sont très vaillants, n’ont rien à perdre et ce n’est pas un miracle s’ils sont en quarts. C’est parce qu’ils le méritent. Je m’attends à un match très ouvert, avec un petit penchant pour la Belgique.
« Quand on observe Conte sur le banc, on a l’impression qu’il joue sa vie »
Dernier quart à évoquer, le plus alléchant, Allemagne-Italie à Bordeaux. Un gros match en perspective. Qu’en dîtes-vous ?
C’est LA grosse affiche de ces quarts de finale. Ce sont des nations de football, une finale avant l’heure. Un Allemagne-Italie c’est toujours un délice ! Je vois déjà l’effervescence côté allemand, et pour les italiens je dirais que c’est comme lorsqu’un animal est touché, un sanglier par exemple et qu’il se révolte. Ce sont des joueurs que l’on ne donnait pas dans les favoris et qui veulent montrer ce dont ils sont capables. Des garçons comme Buffon et Conte sont des meneurs d’hommes qui ont remonté le groupe italien, ça c’est clair. Quand on observe Conte sur le banc de touche, on a l’impression qu’il joue sa vie. J’aime ce genre d’entraîneur qui vit les matches et qui est profondément attaché à son équipe. Un peu comme Simeone avec l’Atlético Madrid. Un jour ils vont mourir sur le banc de touche, même si je ne leur souhaite pas quand même ! (rires)
En tant qu’ancien des Girondins, qu’avez-vous pensé de la dernière saison du club ?
Ce n’est pas une saison à retenir dans les annales des Girondins de Bordeaux, ça c’est clair ! Quand on a le standing des Girondins, et le président Triaud que je connais bien le sait, on ne peut pas être satisfait de la saison écoulée. Ce n’est pas possible. Je pense qu’ils vont tout faire pour remodeler leur équipe et se renforcer avec de grands joueurs, mais pour cela il faut des moyens et ils ne sont pas exorbitants à Bordeaux.
La récente arrivée de Gourvennec qui prône un jeu plus offensif va-t-elle changer les choses selon vous ?
Tout dépend des joueurs qu’il aura à sa disposition. Jocelyn Gourvennec a fait du très bon travail à Guingamp, mais maintenant c’est une nouvelle étape pour lui et pour Bordeaux. Pour moi, les Girondins doivent faire partie du gratin du football français et être au moins dans les 5-6 premiers en Ligue 1. C’est tout le mal que je leur souhaite.
Jérémy Toulalan est devenu girondin pour 2 ans. Recrutement judicieux d’après vous ?
Toulalan on le connaît, c’est un joueur international de plus de 30 ans, c’est un garçon qui a de l’expérience. Et dans une équipe il faut de tout. Des jeunes, des moins jeunes et des gens qui ont une certaine expérience à ce niveau-là. Jérémy possède tout ça. Pour moi, c’est une très bonne recrue car c’est un joueur qui connaît parfaitement la Ligue 1.
« Je n’aurais pas dû partir de Bordeaux »
Regrettez-vous d’avoir quitté le club à l’aube du début de ses années fastes et glorieuses ?
Là vous mettez le doigt là où ça fait un petit peu mal car quand j’ai quitté les Girondins en 1982, je n’ai pas pris la bonne décision. Sur le plan sportif et humain, j’étais bien à Bordeaux. Je ne sais toujours pas à l’heure actuelle pourquoi j’ai fait ce choix-là. Car Aimé Jacquet, Claude Bez et Alain Giresse voulaient que je reste. La direction m’a fait une offre que j’ai refusée. Je n’aurais pas dû partir de Bordeaux. Mais je n’ai aucun regret, j’assume mes choix. Car si j’étais resté à Bordeaux à l’époque, je pense qu’aujourd’hui je ne serai pas à Strasbourg. J’aurais fait ma vie à Bordeaux. C’est pour moi ma deuxième région, on y était bien avec mon épouse et on s’y est fait beaucoup d’amis. Déjà, avant d’aller à Bordeaux c’était très difficile de quitter Strasbourg en 1979. Et quand j’ai quitté Bordeaux c’était très dur également. J’étais très attaché à Alain Giresse dont je suis resté très proche, tout comme avec sa famille.
C’est lui qui était à l’origine de votre transfert en Gironde n’est-ce pas ?
Oui, effectivement. Nous étions en Equipe de France Espoirs ensemble et il m’a dit qu’il savait que Claude Bez avec Jacques Chaban-Delmas voulait bâtir une grande équipe à Bordeaux. Ils souhaitaient me recruter. Je peux vous dire que je n’ai pas hésité longtemps.
Propos recueillis par Anthony RICARTE, à Bordeaux